Le relais 4x100m – Problématique du haut niveau

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Le relais 4x100m – Problématique du haut niveau Témoignage de Jo Maisetti
(Compte-rendu du colloque 2004)
Préambule :
Jo Maisetti a entraîné le relais national masculin de la génération des Bruno Marie-Rose, Max Morinière, Gilles Quenehervé, Daniel Sangouma, Jean-Charles Trouabal, ce fameux relais qui, de 1988 à 1991, a brillamment rapporté à l’équipe de France une médaille de bronze aux JO de Séoul, une médaille d’argent aux Championnats du Monde de Tokyo, et un titre européen assorti d’un record du Monde en 1990 aux Championnats d’Europe de Split.
Présentation de Jo Maisetti
Les grandes qualités individuelles des athlètes que j’ai entraînés ne suffisent pas à expliquer les excellentes performances qu’ils ont réalisées en relais. D’autres conditions sont nécessaires pour garantir la réussite, notamment la construction d’une réelle dynamique collective au sein du groupe d’athlètes, un travail rigoureux et régulier pour garantir la qualité des transmissions, et le maintien de la plus grande vitesse possible du témoin dans la zone.
Créer une dynamique collective
Quelle que soit la qualité du travail technique et physique mis en œuvre à l’entraînement, rien ne remplace l’ambiance, la dynamique que les athlètes auront su construire dans le collectif. Il est important de faire en sorte que les athlètes trouvent du plaisir
à se préparer ensemble. Pour générer cette dynamique collective, j’ai fait en sorte que chaque entraînement puisse être l’occasion de favoriser ce
t esprit de groupe, en intégrant par exemple des passages de témoins lors des footings d’ échauffement ou de récupération, ou un final avec
transmission de relais dans les séances individuelles de course. J’ai également organisé régulièrement des regroupements en stage de manière à stimuler une vie de groupe dépassant le cadre de l’entraînement. Mon idée était de faire en sorte que le relais ne soit pas, aux yeux de mes athlètes, une épreuve de second ordre, passant après les intérêts individuels, mais une épreuve à part entière. J’ai ainsi cherché à développer chez ces athlètes une émulation aussi bien collective qu’individuelle, convaincu que j’étais (et je le suis toujours) que la création d’une dynamique de groupe est une condition nécessaire, indispensable, pour obtenir un résultat en relais.
Garantir la qualité des transmissions

ISTANBUL, TURKEY – FEBRUARY 16, 2019: Athletes running 4×400 during Balkan Athletics Indoor Championships

Compte tenu des écarts réduits des performances individuelles chez les sportifs de haut niveau, ce qui est très déterminant dans l’efficacité d’un relais, ce n’est pas tant la vitesse de course que la qualité des transmissions. Par exemple, dans le relais 4x100m féminin des championnats d’Europe 1998, la somme des temps individuels des coureuses était de 44”24, et le temps du relais de 42”59, soit un gain de 1”65.  Aux Championnats du Monde, ce rapport passe de 44”82 à 41”78, soit un gain de 3”04.

On ne peut donc pas se contenter de regrouper quatre coureurs très rapides pour constituer un relais : il faut aussi travailler dans la durée la qualité de la transmission, sur le plan technique, bien sûr, mais aussi et surtout sur le plan de l’esprit du groupe. Développer une confiance mutuelle entre les coureurs leur permet « d’oser », c’est-à-dire de prendre une forme de « prise de risque » calculée.
Voici quelques exemples de ce que j’ai pu mettre en place à l’entraînement pour développer cette confiance mutuelle :
-Créer des automatismes dans la transmission du témoin en intégrant systématiquement une chaîne de passage de témoin entre les coureurs lors des footings d’échauffement et de récupération
-Faire travailler chaque coureur à tous les postes possibles de relais (1er, 2ème, 3ème ou dernier relayeur)
-Bien distinguer le travail de transmission ligne droite→virage, de celui virage→ligne droite
-Faire travailler la phase de transmission dans toutes les doublettes possibles de coureurs
-Sur la zone des 20 m de transmission, travailler en se donnant toujours une marge de sécurité d’1m à 1m50 (le témoin doit avoir changé de main au plus tard 1m à 1m50 avant la limite de transmission).
Préserver la vitesse du témoin dans la zone

Sportswoman running on a white background against digital image of athletic track

Dans un relais bien négocié, le coureur de haut niveau perd environ 1m/s entre l’entrée dans la zone et le moment de transmission. Il faut faire en sorte que la vitesse se maintienne jusqu’à la transmission, où une situation de tampon va se produire. Cette situation de tampon est inévitable, et ce d’autant plus que les vitesses sont grandes. Elle sera augmentée si des fautes ou des hésitations sont commises.

-L’observation visuelle est la seule qui permette une évaluation « en direct » et à chaud des comportements des relayeurs. On évaluera la vitesse du Donneur dans l’entrée en zone et celle du Réceptionneur au moment de la transmission.
-La transmission la plus efficace est toujours celle qui s’effectue le plus loin possible vers la sortie de zone (25-26m après le début de la zone d’élan  pour la transmission Trouabal→Marie-Rose lors du record du Monde), à condition bien sûr que le Réceptionneur n’ait pas à ralentir pour recevoir le témoin avant la sortie de zone.
-Pour limiter au maximum le temps de fixation du bras du Réceptionneur, on peutanticiper le « hop », quitte à ce que ce soit le Donneur qui ait à maintenir le bras fixé.
Ceci permet au Réceptionneur de conserver le plus longtemps possible le mouvement des bras en coordination avec le rythme des foulées. Cette anticipation du « hop » n’est possible que pour des athlètes de haut niveau (qui vont vite et maîtrisent la transmission).
-Marques au sol pour le Réceptionneur : il faut veiller à ne pas stéréotyper la phase d’élan-réception, mais plutôt à privilégier la ”lucidité” de l’athlète. La marque n’est qu’un repère ; chaque athlète doit apprendre à lire la situation, à sentir la vitesse d’arrivée de son partenaire, pour pouvoir le cas échéant, décider d’anticiper ou de retarder son départ par rapport à la réalité de l’action, plutôt qu’en se focalisant uniquement sur la marque. Pour développer cette lucidité, je préconise de :
  • Faire travailler les athlètes sans repères,
  • Les faire travailler avec des marques très visibles (plus grandes que celles autorisées en compétition). Ceci permet aux athlètes de voir plus facilement à la fois le coureur qui arrive et la marque, et évite ainsi qu’ils ne se focalisent que sur la marque.
La position d’attente du relayeur
Le relais hommes que j’entraînais présentait une particularité : sa technique d’attente et de départ du relayeur, caractérisée par un mouvement de descente en arrière précédent la poussée vers l’avant. Cette technique originale mais efficace est la suivante :
Il est impératif que le relayeur ait une position d’attente stable (ceci passe par un écartement des pieds) et verticale. Puis une descente sur l’arrière (passage de la position d’attente redressée à un abaissement pour se mettre en position de départ « Vitesse ») se fait de manière lente au départ, l’important étant d’éviter tout temps d’arrêt. En même temps, le regard passe de l’arrière vers l’avant, de telle sorte qu’au moment du décollage vers l’avant, la tête soit dans l’axe de course, regard vers l’avant. L’idée est de ne pas s’engager de la position d’attente à la position de course par une bascule des épaules vers l’avant (tendance du débutant), mais à partir d’une translation du bassin.
Propos recueillis par Nadine Debois
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