Un régime, pourquoi faire ? par Denis Riché
QUELQUES PRÉAMBULES :
L’obésité constitue aujourd’hui ce qu’on nomme un enjeu de santé publique, car elle concerne de plus en plus d’individus de tous âges. Les scientifiques américains qui étudient la question évoquent d’ailleurs une véritable « épidémie ». Pathologie multifactorielle, elle est souvent abordée sous l’angle exclusif de l’équilibre entre les apports caloriques et les dépenses, notamment celles liées à l’exercice physique. L’inactivité croissante d’une fraction de plus en plus importante de la population, portant autant sur le recul de sport que la sédentarisation et l’automatisation croissante de nos tâches, participe évidemment à ce problème. Au point qu’un des objectifs avoués, aujourd’hui, est de faire en sorte que les plus oisifs d’entre nous en reviennent à trois séances hebdomadaires de marche d’une demi-heure, à une allure qui permette encore de chanter.
Ce « minimum vital », très en deçà de ce qu’effectue à l’entraînement le moindre de nos lecteurs, lorsqu’il est prescrit en même temps qu’un programme alimentaire cohérent, se révèle souvent efficace en termes de perte de poids.
Ce qui amène deux remarques. La première c’est que l’existence objective d’un problème de poids chez un coureur aguerri relève d’autres causes que de simples mauvais choix alimentaires, et la résolution de ce problème ne passera pas par la restriction. La seconde, c’est que le sujet affecté d’un excédent de kilos qui choisit de se remettre à la course n’aura le plus souvent qu’à adopter une hygiène de vie appropriée pour voir sa pratique athlétique s’accompagner d’une fonte du gras superflu.
Il existe une autre possibilité à cette volonté d’amaigrissement : celle de perdre quelques centaines de grammes dans le but de gagner en compétitivité. Le raisonnement à l’origine de ce choix est le suivant : Chaque coureur possède une consommation maximale d’oxygène, exprimée en ml/mn.kg, mais qu’on peut aussi traduire en l/mn. Cette cylindrée est assez fidèlement corrélée à la vitesse de course. Imaginons le cas d’un coureur qui pèserait 60 kg et possèderait une V02 de 70 ml/mn.kg, c’est-à-dire une puissance de 60 x 70 = 4200 ml/mn. Suivons son raisonnement : En se délestant de 2 kg, il consommerait cette même quantité d’oxygène de manière différente, à savoir qu’il aurait l’aptitude théorique de 4200/58 = 72 ml/mn.kg. En termes de vitesse, cela reviendrait à une progression de 3,8 x 0,2 = 0,75 km/h. Pas négligeable.
Sauf que ce raisonnement comporte plusieurs biais. D’abord, les efforts nécessaires peuvent conduire à des restrictions qui rendent difficile le respect du programme. Au final, on court plus léger, mais plus fatigué, quelle aubaine ! Quand ce n’est pas, tout simplement, qu’on doit s’arrêter. En effet, s’astreindre à un tel régime, quand on possède peu de masse grasse, conduit nécessairement à une perte de masse maigre, certes au détriment du muscle, mais aussi aux dépens de l’immunité. Le but de l’entraînement étant quand même de s’entraîner et de progresser, on passe dans ce genre d’approche à côté du but affiché.
Par ailleurs une étude récente, menée par le Pr Martin Hoffman de l’Université de Sacramento, a montré que, sans doute à l’étonnement de bon nombre de nos lecteurs, la corpulence moyenne des coureurs entrant dans le « Top 10 » des courses d’ultra est supérieure à celle du reste du peloton. Une prime à la puissance et à la robustesse en somme. Et cela nous ramène au raisonnement précédent. Car l’oxygène consommé par le coureur sert à produire du travail musculaire.
Or, un trailer solide, voire un adepte du renforcement musculaire, va certes gagner du poids (et théoriquement aller moins vite).
Mais on oublie qu’avec la même quantité d’oxygène il fournit plus de travail, donc effectue plus de mouvement, y compris dans les derniers hectomètres de la « Trans Grancanaria Trail » par exemple. De fait, quand on prône la légèreté « coûte que coûte », on s’arrête simplement au milieu du raisonnement ! De ce constat il ressort une chose simple : L’idée qui consiste à vouloir être plus léger pour aller plus vite n’est pas justifiée chez un coureur maigre. On doit substituer à ce raisonnement le suivant : Chercher à être plus fort pour se déplacer à un coût moindre.
Reste le cas de certains amateurs, ces adeptes de la course longue distance qui traînent des kg superflus, n’arrivent pas à s’en débarrasser, s’en plaignent et en pâtissent. Il s’agit, de toute évidence d’un énorme paradoxe. Comment s’entraîner quatre heures par semaine, et parfois jusqu’à dix heures et posséder un excès (relatif…) de masse grasse ? Il faut évidemment admettre que, dans leur cas, il y a un « virus » dans le disque dur. Trois causes peuvent être envisagées à un tel paradoxe. La première c’est l’existence d’un « terrain » métabolique, propice au stockage, lequel s’exprimera notamment à l’occasion de tout arrêt sportif (par exemple lors d’une blessure ou d’une maladie).
La seconde, c’est la présence d’un possible trouble du comportement alimentaire. Le coureur de trail serait face à son assiette comme face au calendrier des épreuves : boulimique et incontrôlable (il paraît que çà arrive !).
Et dans ce cas, la restriction sera sans effet. Évidemment, elle se verra intégralement compensée dès l’arrêt de l’activité (coupure, maladie, blessure, contretemps professionnel) par un accès d’hyperphagie incontrôlée et compensatoire. La dernière tient à de fréquentes carences en micronutriments, dont les répercussions sur notre métabolisme sont connues. Selon les causes du surpoids, la stratégie à adopter variera. En quelque sorte, il faut faire du « sur mesure », et non faire entrer le sujet dans un moule. C’est tout l’inverse de ce qui se passe avec le régime pamplemousse, celui de la « soupe aux choux », du « docteur Dukan » ou que sais-je ? Leur justification est à peu près la même que celle du conducteur qui affirme que : « quand ma voiture s’arrête brutalement, je tape avec un caillou sur la batterie. Parfois elle repart ! »
Reste enfin, parmi les candidats au régime, le cas de tous ceux à qui il ne s’adresse pas, mais à qui on ne le refuse jamais. Les statistiques nous apprennent, par exemple, qu’une femme sur deux fait un régime ou restreint son alimentation. Parmi celles-ci, moins de la moitié présente objectivement un surpoids. La proportion de coureuses en restriction calorique est supérieure encore, beaucoup d’entre elles suivant un régime alors qu’elles sont objectivement maigres. Au-delà de l’idée selon laquelle la légèreté est un atout- ce qui peut conduire à une recherche anti-physiologique de la maigreur, ce constat montre surtout que le poids permet de focaliser d’autres causes de mal-être, et que cette « restriction cognitive », comme disent les psychiatres, évite d’avoir à se poser les bonnes questions sur soi. Cela étant précisé, revenons plus en détail sur les causes d’un éventuel surpoids.
LE PROBLÈME DU « TERRAIN MÉTABOLIQUE » :
Beaucoup de sportifs, au moment où ils arrêtent ou diminuent leur activité, commencent à prendre du ventre et à développer des anomalies biologiques. Surtout après 40 ans, et pas forcément en raison d’erreurs diététiques grossières. Cette anomalie, qui a reçu plusieurs noms, syndrome polymétabolique, syndrome X, ou plus communément « syndrome du gros ventre », présente une forte composante génétique et touche 40% des hommes de plus de 45 ans. Mais avant cela, il se manifeste, parfois avant la trentaine, par cette facilité à stocker. Prenons une image : cette tendance métabolique correspond à l’état d’un individu qui mettrait 70% de son salaire sur son CODEVI et vivrait chichement avec le reste. En raison de cette prédisposition, on stocke beaucoup, même en mangeant raisonnablement.
Le « syndrome polymétabolique » associe des perturbations affectant différents métabolismes, comme son nom l’indique. Il porte à la fois sur celui des sucres, celui des lipides et enfin sur celui du sel. A un stade évolué, il se traduit notamment par une glycémie à jeun supérieure à 1,10 g/litre.
Ce chiffre se situe nettement en deçà de la limite qui correspond au diabète (1,40 g/l), mais il traduit déjà une anomalie dans la régulation de la glycémie. Chez un sédentaire, la barre peut être franchie assez tôt dans la vie. Chez le coureur, l’avidité du muscle pour le sucre et la propension à le consommer en cours d’effort modifie un peu la donne. Cependant, une glycémie à jeun à 0,95 ou 0,98 g/l chez un coureur n’ayant pas encore atteint le cap des V1 ne peut plus être considérée comme tout à fait normale. Si rien n’est entrepris, il franchira tôt ou tard la barre fatidique, après avoir gagné quelques kg mal placés.
L’un des signes avant-coureurs, c’est la facilité avec laquelle on stocke du gras sur le ventre, gras essentiellement fabriqué à partir du sucre. Chez les futurs porteurs du syndrome métabolique, il n’existe pas de grande différence, en ce qui concerne les réponses physiologiques, entre « sucres à index élevé » et « sucres à index bas » (voir le dernier numéro). Tout glucide pris à distance de l’activité augmentera, chez eux, la probabilité de fabriquer du gras… d’où une fréquente prise de poids à l’occasion de chaque interruption de l’entraînement.
A terme, l’existence de ce syndrome s’accompagne de complications biologiques. Or, on sait aujourd’hui qu’elles et le surpoids peuvent s’améliorer de concert, non pas par une politique de restriction aveugle, mais par l’adoption d’un mode alimentaire dont les principes visent à limiter les « incursions » hyperglycémiques, autrement dit, à éviter au maximum les fortes élévations d’insuline. Comment faire ? La prise en charge de ce syndrome devrait répondre à deux objectifs, qui n’ont rien à voir avec la suppression du sucre, des graisses en général ou du cholestérol.
Le premier, et pas le plus facile à satisfaire, consiste à « reformater » le disque dur, autrement dit à mettre en œuvre des acteurs nutritionnels capables de restaurer une meilleure réponse à l’insuline. Certains nutriments comme le chrome, le zinc, les acides gras de la lignée « oméga 3 », ou des aliments réputés moduler l’insulino-secrétion comme l’ail, l’oignon, le soja ou le fenugrec seront précieux dans ce contexte. Le second consistera à éviter les pics d’insuline. Cette stratégie sera plus subtile, dans sa réalisation, que le simple évitement de tout aliment à saveur sucrée. La discrimination entre aliments « à consommer » et ceux « à éviter », fera appel au concept de « charge glucidique », c’est-à-dire à une appréciation des perturbations de l’insuline induites par la consommation de ces denrées. Cela signifie que les fruits et légumes, les légumes secs et les céréales complètes (en quantité raisonnable) seront privilégiés, alors que la plus grande prudence s’imposera à l’encontre des céréales raffinées, du pain blanc, du sucre et des produits riches en sucre. Les glucides seront consommés juste avant, pendant et juste après l’activité, de façon à limiter le risque de les voir se transformer en graisses. De plus, l’approche la plus appropriée consistera à proposer l’adoption d’un modèle méditerranéen d’inspiration crétoise. Cette stratégie préventive devrait être initiée très tôt, chez les sujets à risque, en particulier lorsque leur niveau d’activité physique va décroître.
LES DÉFICITS QUI FONT GROSSIR :
Le fonctionnement de notre métabolisme, la capacité à mobiliser les graisses, et le travail optimal des muscles requièrent la présence à un taux optimal de divers micronutriments, dont l’absence ou l’insuffisance ont un impact souvent insoupçonné sur l’équilibre pondéral ou la faim. Schématiquement, à chaque fois qu’un déficit existe, on descend d’une marche de l’équilibre vers le surpoids ou la résistance à l’amaigrissement. Quels sont les nutriments potentiellement impliqués ? Citons d’abord le fer.
Ce minéral, souvent déficitaire chez les coureuses, participe aux réactions de « lipolyse » (c’est-à-dire de combustion des graisses), ainsi qu’à la synthèse de molécules actives dans notre cerveau, et nommés les neurotransmetteurs.
L’un de ceux-ci, la sérotonine, est plus particulièrement impliqué dans le contrôle des pulsions alimentaires, le rassasiement et la vulnérabilité au stress. Sa synthèse insuffisante, par le biais de pulsions sucrées en fin de journée, d’une tendance accrue au grignotage, d’une perception difficile du rassasiement, va donner lieu à une prise de poids.
Ces prises alimentaires non motivées par la faim (avoir envie de manger ne signifie pas avoir faim) ne dépendant pas de la partie consciente du cerveau, et n’ont aucun lien avec la motivation ni la volonté, contrairement à ce qu’on croit souvent.
Or, beaucoup de stratégies diététiques (par exemple « Weight Watchers », véritables « Alcooliques Anonymes » du surpoids) font appel à la volonté et à la culpabilisation de ceux qui font des erreurs… sans beaucoup de réussite, mais en induisant par contre un sentiment de honte et d’échec qui peut enclencher le cercle vicieux de la prise alimentaire compensatoire. Ce processus explique aussi tous les comportements de fuite rencontrés par ceux ou celles qui « veulent vraiment » perdre du poids, mais ont peur de ceux qui proposent les régimes. Ce sont alors ni plus ni moins des animaux traqués, du moins dans leur cerveau reptilien, celui qui les pousse à grignoter « malgré eux » à 17 h (je le sais, je les ai vus…)
Le deuxième déficit à évoquer, rarement recherché, est celui qui concerne l’iode. Cet oligo-élément est surtout connu pour son intervention au niveau de la glande thyroïde. Cette petite glande située à la base du cou, sert de thermostat à notre organisme, et ajuste notre niveau de dépense.
Toute baisse de production d’hormones par la thyroïde va dons se traduire, potentiellement, par une prise de poids. Quel est le lien avec l’iode, me direz-vous ? C’est le suivant ; La thyroïde élabore une hormone appelée thyroxine qui comporte trois atomes d’iode (T3) sur base d’une autre hormone qui en comporte quatre (T4). Cette production se déroule au terme d’un processus assez complexe qui nécessite, par ailleurs, la présence de fer et de sélénium. Une carence dans n’importe lequel de ces trois produits bloque le processus. L’excrétion urinaire de l’iode sur 24 heures constitue un bon reflet du pool d’iode de l’organisme. Cette mesure pourrait être utilisée de manière routinière, en épidémiologie ou en clinique, pour apprécier le statut d’un individu ou d’une population. On estime classiquement qu’une iodurie (concentration d’iode dans les urines) inférieure à 50 µg par litre, reflète des apports très faibles. A moins de 25 µg/l, on peut être sûr qu’il existe un très sérieux problème. Lorsque cette mesure est réalisée couramment, on peut trouver jusqu’à 66% de valeurs trop basses chez les individus en surpoids ou incapables de maigrir malgré des régimes draconiens… qui sembleraient marcher chez d’autres. J’ai fait ce constat, par exemple, de 2006 à 2010 sur 520 mesures d’iodurie. D’où vient ce déficit ? Il résulte, entre autres causes, d’apports trop faibles. Pour couvrir a minima ses besoins il faudrait avaler au moins une portion de fruits de mer et deux portions hebdomadaires de poissons marins. Faute de quoi, la probabilité de se trouver en déficience augmente…
Les poissons nous amènent vers le troisième des déficits les plus impliqués dans cette affaire de surpoids, celui des acides gras « oméga 3 ». Il paraît étonnant de penser que des carences en graisses puissent empêcher de maigrir ! Et pourtant c’est le cas. Cet apparent paradoxe tient à l’aptitude présentée par certains lipides à influer directement sur l’expression de gènes codant pour des enzymes participant à l’utilisation des graisses. C’est le cas des acides gras de la lignée « oméga 3 ». Lorsque leurs apports atteignent un niveau suffisant, cela va se traduire par la présence d’un plus grand nombre d’enzymes brûlant les graisses par gramme de muscle et de tissu adipeux. Les graisses deviennent alors le carburant privilégié de l’organisme. Cet effet peu connu a souvent du mal à se manifester. Notamment parce que environ 90% des athlètes sont confrontés à un double problème ; d’une part, leur ration renferme trop peu de graisses de la famille « oméga 3 », indispensables au fonctionnement optimal de leur organisme. D’autre part, leur consommation totale de lipides est trop juste. En effet, on confond souvent « manger des graisses » et « stocker des graisses ». Or ces deux situations n’ont rien à voir. De ce fait, tout candidat au régime se restreint en sardines, huiles, oeufs, et se placera immanquablement en situation de déficit et de résistance à l’amaigrissement.
LES PROBLÈMES DE COMPORTEMENT :
La difficulté à maigrir rencontrée chez des sujets très actifs peut aussi, indépendamment des problèmes de déficit et d’un métabolisme désavantageux, relever d’un déficit en sérotonine, molécule dont on a vu qu’elle contrôlait le rassasiement. On la fabrique à partir de notre alimentation, et de nombreux facteurs peuvent influer défavorablement sur cette synthèse. Comment se débrouille-t-on quand elle nous fait défaut ? La consommation accrue d’aliments sucrés est un comportement compensatoire, une sorte d’état d’urgence, qui va répondre en partie à ce déficit, quitte à conduire à des pulsions irrépressibles à l’origine d’un surpoids manifeste. Ainsi, lorsqu’un ancien fumeur débute un sevrage, il arrive souvent qu’il traîne toujours un déficit de sérotonine et qu’il compense par des boulimies de bonbons ou de gâteaux qui peuvent très vite lui faire gagner dix kilos voire davantage, bien plus en tout cas que ce qui résulte du seul arrêt de la consommation de nicotine, qui est un modeste activateur du métabolisme. Comment s’effectue ce basculement brutal du tabac vers les douceurs ? Des travaux très intéressants ont montré qu’une zone particulière de notre cerveau, le « nucleus accumbens », serait la cible de diverses drogues telles que les amphétamines, la nicotine, la cocaïne. Elles interviennent notamment en favorisant la libération de sérotonine.
La solution ne va pas consister à poser des cadenas sur les portes des placards ou à se bander les yeux lorsque vous partez faire les courses pour la semaine. Ni de vous faire, tous les matins, un œuf à la coke… Il va plutôt s’agit de combler ce déficit, par une stratégie individualisée, faisant appel à des compléments ciblés. Il va également s’agir de respecter une certaine chronologie alimentaire, permettant d’influer sur les fonctions cérébrales. L’un des moyens mis en œuvre consistera à manger plus de protéines le matin et à privilégier les féculents au repas du soir. De fait, il faudra associer les deux approches, alimentaire et complémentaire. L’une seule d’entre elles ne se révèlera pas suffisante.
Enfin, l’évocation de la nutrition cérébrale nous renvoie à un autre point : la fausse appréciation de son poids corporel et la volonté de maigrir à tout prix. Les régimes ne constituent pas, alors, une réponse efficace ni souhaitable, en ce sens qu’elle entretient les sujets dans leur déviance comportementale. Un suivi psychologique sera alors plus approprié.
Pour résumer, l’accompagnement du surpoids authentique chez le coureur et la coureuse doit d’abord s’appuyer sur l’identification des causes de ce surpoids, et de là sur une stratégie individualisée qui ne consistera pas à proposer un « copié-collé » du dernier régime à la mode. Il faudra au contraire traiter à la source les causes du surpoids constaté et s’inscrire dans une logique de réforme en douceur dans le temps, plutôt que dans celle de la révolution qui échouera… jusqu’à celle du printemps suivant ! De fait, aucun régime systématique, hypocalorique, protéique, ou autre, n’a a priori grâce à mes yeux. A qui s’adresse-t-il ? Comment ? Pourquoi ? Que cache le surpoids ? En l’absence de réponses claires, on se prépare à un échec, comme dans 95% des cas, statistique établie par les experts quand on analyse les données avec un an de recul. D’où la nécessité de passer à une approche de la question qui soit véritablement scientifique et dénuée de dogme, de croyances, de pensées magiques ou de solutions toutes prêtes !
Denis Riché
Doctorat en nutrition humaine et
Spécialiste français de la micronutrition
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Courir plus vite que vite pour continuer à progresser par Hélène Bossé
Les sprinteurs sont souvent confrontés dans leur carrière à une stagnation voire à une régression de leurs performances .L’entraineur doit alors émettre plusieurs hypothèses pour identifier les causes et les mécanismes de cet obstacle.
Une des hypothèses à soulever serait celle de l’installation d’une barrière de vitesse qui agirait comme un frein dans le fonctionnement de la contraction musculaire et qui serait l’explication d’une déficience dans les possibilités d’expression de la vitesse.
Lors d’un colloque sur la préparation physique, Frédéric Aubert évoquait la notion de « stéréotype rythmique » pour signifier l’installation d’une routine neuromusculaire qui entrainerait un blocage de la vitesse.
Pour comprendre il faut se représenter de façon très schématique et simpliste le mécanisme de la contraction musculaire lorsqu’on fait un mouvement. Il faut imaginer le système nerveux comme un réseau électrique constitué de milliards de fibres nerveuses, qu’on appelle les neurones et qui sont reliés entre eux par des synapses.
Quand un stimuli est perçu interne ou externe comme le coup de pistolet du départ, il se transforme alors en un influx nerveux qui se propage sous forme de signaux électriques (les potentiels d’action) jusqu’au système nerveux central (la moelle épinière et l’encéphale).
Ce SNC traite cette information pour la faire «redescendre » ensuite vers les cellules musculaires qui donneront alors l’ordre aux muscles de se contracter ou de se relâcher en fonction de la réponse à apporter à la situation.
La plupart des ces réactions qui construisent le geste sportif sont des réflexes moteurs. On pourrait parler de comportement automatique nécessaire à l’expression d’une vitesse.
Le problème de vitesse se pose quand le circuit électrique emprunté est toujours le même et que s’installe une sorte d’habitude fonctionnelle. Le muscle dés lors n’est plus surpris et s’enferme dans une forme de monotonie. On aurait là une des explications de la barrière de vitesse !
Il faut donc réussir à créer de nouvelles voies de propagation de l’influx nerveux pour améliorer la conduction neuromusculaire. C’est là que le travail de survitesse prend tout son sens. L’entraineur doit créer les conditions souvent artificielles qui vont permettre à l’athlète de courir plus vite que vite.
La 1ère condition est de créer une stimulation au dessus de la valeur seuil mais cependant très proche des possibilités naturelles de l’athlète. On peut proposer pour ça un travail en descente où l’athlète prendra artificiellement de la vitesse pour ensuite l’entretenir sur le plat.
Il faut trouver une descente de 5 à 8 degrés maximum qui se prolonge sur une ligne droite sur laquelle on disposera une dizaine de petites lattes rapprochées. L’athlète devra s’engager de façon importante dans cette descente pour ensuite être contraint de poser un pied entre chaque latte.
La 2ème condition est de se confronter plusieurs fois à cette situation en restant à haut régime. Pour ça l’entraineur peut chronométrer ce parcours latté pour inciter l’athlète à maintenir un travail à haute intensité. On déclenche le chrono à la pose du pied dans le 1er intervalle et on l’arrête à la pose du pied derrière la dernière latte.
La 3ème condition est de donner la priorité à la qualité du travail et non à la quantité. Ainsi il faut donner une récupération complète entre les répétitions (2’ à 3’) et cesser l’exercice quand on observe une baisse de l’intensité. Celle-ci se manifeste par une augmentation du chrono, par une dégradation du geste, par une fatigue nerveuse signifiée telle que « je suis cuit ».
Il est important de comprendre que ce travail très couteux nerveusement mais aussi musculairement peut engendrer des blessures par saturation du muscle si les prérequis n’ont pas été travaillés en amont. En effet il est indispensable de faire un travail préparatoire à base de pliométrie, de gainage, de souplesse pour assumer ces hauts registres de sollicitation. De plus il est important de programmer cette séance sur un fond de fraicheur physique c’est-à-dire après 1 ou 2 jours de repos et plutôt en phase pré-compétitive.
Il est également utile d’associer à ce travail de survitesse, un travail de technique de course qui se fera dans une autre séance. En effet la contrainte matérielle qui nécessite d’exprimer une vitesse « extraordinaire » engendre une dégradation de la qualité du cycle de jambe (hyperfréquence).
La 4ème condition est la nécessité de varier les situations de survitesse pour ne pas risquer une nouvelle stagnation des performances. Il existe donc d’autres exercices qui tendent à provoquer un déséquilibre rattrapé par une accélération du déplacement. Le travail avec charge tractée suivi d’un « largage » en est un bon exemple.
En effet durant le court laps de temps de l’accélération provoqué par le largage, de nouvelles fibres nerveuses sont sollicitées.
Pour ça on peut utiliser une ceinture avec deux poignets. L’un court et l’autre retient le coureur quelques mètres avant de le lâcher par surprise: Attention cependant à la dangerosité potentielle de cet exercice.
On peut aussi utiliser un parachute pour créer la résistance à l’avancement puis ensuite se larguer soi-même
Enfin on ne peut que citer le travail fait par les sprinteurs français et mentionné cet été dans les médias, concernant l’utilisation d’outils innovants pour continuer à progresser.
C’est le cas de Guy Ontanon qui a convaincu l’INSEP de s’équiper d’un matériel allemand aux réglages très précis pour parvenir à mettre ses athlètes en situation de survitesse. Les athlètes sont reliés par un câble à une machine qui offre la possibilité de les faire courir au-dessus de leur vitesse naturelle maximale.
Les mêmes effets sont obtenus avec des ceintures de survitesse. L’exercice se réalise à deux. L’un placé devant (B) et raccordé à un point fixe (C) tracte le sprinteur (A) placé à l’arrière du dispositif.
Grâce à un système de poulie qui fonctionne comme un palan, le sprinteur voit alors sa vitesse augmenter artificiellement et de façon significative.
Conclusion
Le problème de la barrière de vitesse a été ici exploré par le prisme de sa dimension neuro biologique. Il est possible d’envisager d’autres facteurs, notamment ceux d’ordre psychologique et motivationnel. En effet lorsque l’on connait l’importance de la confiance et du mental sur la réussite, on doit aussi explorer cette dimension. Une des astuces est de priver l’athlète de ses points de repères habituels. Par exemple on lui prend des temps sur 55m ou 70m plutôt que sur 60m ou 70m.
En dépit de zones d’incertitude sur les origines de cette barrière de vitesse, la compétence de l’entraineur à faire progresser les sportifs qu’il entraine, relève aussi de sa faculté à interroger ses propres méthodes, et à comprendre que ce qui marche un jour, ne marche pas pour toujours.
Passez la survitesse
Photo: Frédéric Poirier
Hélène Bossé
Entraineur d’athlétisme BEE2
Enseignante agrégée en STAPS à l’Université Paris Est Créteil
Bibliographie :
« la préparation physique », M. Pradet, coll entrainement , édition INSEP
« La préparation physique moderne », A. Broussal, O. Bolliet, coll Counter movement
« Comprendre l’athlétisme », JL Hubiche , M. Pradet , coll entrainement, édition INSEP
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A QUOI SERVENT LES GRAISSES ? par Denis Riché
Même les sportifs les plus maigres d’entre nous possèdent suffisamment de graisses de réserve pour enchaîner plusieurs lectures successives de votre revue favorite sans manger. Grâce à un pannicule adipeux, localisé essentiellement sur le ventre, que d’aucuns considèrent comme une masse inerte plus ou moins inutile. C’est loin d’être le cas.
UN RÉSERVOIR SANS FOND…
Si nous procédions un rapide sondage auprès d’un échantillon représentatif de sportifs, à la question « A quoi sert le tissu adipeux ? », certaines réponses fournies seraient très prévisibles. Il serait d’abord question d’un isolant mécanique, protégeant les organes vitaux. C’est une évidence dans le monde du rugby : « Je pense qu’il faut un peu de graisse pour protéger les muscles, notait avec justesse Jean Paul Garuet à ce sujet (*). J’ai croisé des piliers un peu sculptés avec une taille de guêpe, poursuivait-il. Pas bon signe, je savais qu’ils allaient faire pschitt ! » Au journaliste qui lui demandait s’il revendiquait la graisse, l’ancien joueur de la première ligne de l’équipe de France lâchait spontanément : « Cà oui ! On est des piliers quand même ! Il faut une couche pour protéger les tendons. Les contacts en première ligne, c’est pas fait pour les mannequins. »
On évoquerait aussi sans doute le réservoir d’énergie, masse inerte, souvent perçue défavorablement car, en alourdissant inutilement le joueur, il affecte sa vitesse de course. Comme le note l’actuel international Olivier Milloud : « on doit garder de la puissance, mais améliorer la vitesse et l’endurance, alors forcément on tape dans le gras. » Le compromis entre légèreté et robustesse est souvent compliqué à trouver :
« L’apparence physique, c’est important au coup d’œil, poursuit Milloud, après, il faut voir si le mec résiste au coup de tronche. L’équation mec bedonnant égale mec pas bon ne se vérifie pas. »
De fait, le rugbyman moderne, comme n’importe quel autre sportif de haut niveau en ce début de siècle, est écartelé entre la volonté de posséder un isolant qui le protège et de limiter un poids mort qui le freine. Mais à aucun moment, dans le milieu des profanes, le tissu adipeux n’est vu sous un autre angle.
(*) : « L’Equipe Magazine », 21 juillet 2007.
AVOIR LA BOULE OU AVOIR LES GLANDES ?
Savez-vous quel est l’organe qui, au sein de notre corps produit le plus d’hormones ? Ce ne sont pas les surrénales, ce ne sont pas les ovaires ou les testicules. Il s’agit du tissu adipeux (6). Bien que récente, cette découverte revêt en fait un caractère très spectaculaire, notamment par la diversité et la complexité des molécules qui y sont fabriquées et y circulent. L’origine-même de ces adipocytes et des cellules voisines qui forment ce pannicule est extrêmement troublante.
Comme le rappelle un récent article, l’essentiel du tissu adipeux est composé d’adipocytes, environ les deux tiers du total des cellules présentes, mais on y trouve bien d’autres lignées cellulaires, capables d’exercer une multitude de fonctions et de fabriquer une diversité de molécules pour le moins impressionnantes.
Mais revenons à nos adipocytes. Eux-mêmes possèdent l’aptitude à produire et à libérer diverses molécules qualifiées par les scientifiques de « bioactives ». Leur nature leur fait ressembler fortement à des hormones. Leur origine adipocytaire amène à parler, à leur sujet d’adipokines, un terme qui deviendra de plus en plus courant dans les années à venir. Certaines de ces molécules exercent des actions à distance du tissu adipeux. On pense ainsi à la plus connue d’entre elles, la leptine (découverte en 1994), et dont les effets sur le système nerveux ont été intégralement identifiés ces dernières années (1). D’autres gardent une action plus restreinte, localisée au seul tissu adipeux. Une telle profusion de sécrétions souligne la richesse de communications entre l’adipocyte et les autres organes. Ces échanges contribuent au contrôle du remodelage et du développement du tissu adipeux, de la prolifération et de la différenciation des futurs adipocytes (ce qu’on nomme les précurseurs adipocytaires), ainsi que l’angiogénèse.
Le classement des adipokines et des autres productions du tissu adipeux selon leurs rôles fonctionnels permet de distinguer des grandes familles de molécules affectant divers processus. Une première série peut agir sur le métabolisme des sucres et des graisses. On trouve parmi celles-ci des molécules dont les noms devraient nous devenir très familiers : leptine, adiponectine, résistine, visfatine. Il s’agit aussi, curieusement, des « interleukines » 6 et 10. Ces dernières sont des messagers du système immunitaire et de l’inflammation, et leur présence dans cette liste peut surprendre. Mais en fait, elles peuvent influencer l’orientation du métabolisme et la facilité à mobiliser ou stocker les graisses.
Le tissu adipeux a l’aptitude à fabriquer ces messagers du système immunitaire et, inversement, à réagir à des cytokines périphériques, ce qui peut conduire, par exemple, à des situations de résistance à l’amaigrissement en cas d’inflammation (3).
Il est par exemple admis que l’accroissement du tissu adipeux de l’obèse conduit à un déséquilibre dans la production et la sécrétion de molécules anti et pro-inflammoires, en faveur de ces derniers (11) (*).
Une seconde série règle l’appétit et la régulation de la balance énergétique. Ces molécules donnent en quelque sorte du poids à l’hypothèse du « lipostat ». Rappelons que ce concept suggère que la prise alimentaire pourrait être modulée par le statut du tissu adipeux. Cette modulation reposerait sur des phénomènes allant au-delà du simple aspect énergétique que représente le niveau de remplissage des adipocytes. Quelles sont ces molécules issues du tissu adipeux, capables de modifier notre prise alimentaire ? La plus connue est la leptine, déjà citée ci-dessus. C’est une hormone anorexigène, dont la libération dans l’organisme a pour effet d’interrompre la prise alimentaire. Son intervention limite donc le risque de surpoids, ce que suggère d’ailleurs son nom (qui vient du grec « leptos », qui signifie « maigre »).
Une troisième série jour un rôle tout à fait insoupçonné par une large part du public : Elles participent à l’immunité. Une kyrielle d’acteurs impliqué dans nos défenses se trouvent ainsi dans ce tissu, bien plus que dans la plupart des autres : IL-6, IL-10, TNF-α (Tumor Necrosis Factor), ces notions pouvant permettre de mieux comprendre pourquoi le surpoids majore les problèmes d’arthrose (y compris au niveau des mains), de cancer ou de maladies cardio-vasculaires. Dans ces situations, ce n’est pas tant la surcharge de kilos que les acteurs de l’inflammation qui sont à accuser.
Une quatrième série vient moduler la sensibilité à l’insuline. Cette particularité explique pourquoi le tissu adipeux constitue un acteur déterminant dans l’instauration du « syndrome métabolique », entité clinique complexe déjà évoquée dans ces colonnes (voir « Sport & Vie » n° ) (8, 16). Enfin une dernière série de molécules activent l’angiogénèse (la formation des vaisseaux), et la pression artérielle. Bref, on le comprend, le tissu adipeux constitue une glande qui vient mettre son grain de sel dans un nombre incroyablement important de processus et possède de ce fait un pouvoir de nuisance extrêmement élevé. Est-ce irréversible ?
(*) : Certains travaux récents soulignent qu’en situation inflammatoire aigüe, des ajustements métaboliques se produisent. Certains d’entre eux s’accompagnent d’une surconsommation du tryptophane, ce qui va abaisser la synthèse de la sérotonine (4). Or, cette molécule joue un rôle essentiel dans le contrôle du comportement alimentaire. Aussi, au stade inflammatoire de l’obésité, des prises d’aliments sucrés, à caractère addictif, se produisent et accentuent le surpoids, ce qui provoque un véritable cercle vicieux.
On a donc vu que le tissu adipeux, selon qu’il va plus ou moins se développer, peut déclencher une série de catastrophes à distance. Face à ce constat, et devant ces mécanismes qu’on a longtemps suspectés avant d’en démontrer la réalité, une évidence est apparue aux yeux des scientifiques. Il faut éviter la prolifération du tissu adipeux. Deux mécanismes peuvent conduire à l’apparition d’une surcharge grasse. La première se nomme l’hyperplasie. C’est l’existence d’un nombre anormalement élevé d’adipocytes. La seconde est l’hypertrophie : c’est son remplissage par les graisses alimentaires ou fabriquées à partir des sucres.
A remplissage équivalent de ses adipocytes, un individu qui possède moins de cellules grasses que la moyenne sera exposé à un moindre risque de surpoids. L’inverse est également vrai : celui qui disposerait d’un nombre d’adipocytes supérieur à la norme courrait un risque accru d’obésité. Et dans ce cas, il n’y a plus de limite théorique au remplissage des adipocytes. Le record actuel est actuellement le triste apanage d’un mexicain qui pèse aujourd’hui près d’une demi-tonne (voir l’encadré 1).
Le consensus existant jusqu’au début de ce siècle était de considérer que, hormis quelques âges clefs, le nombre de cellules adipeuses ne bougeait plus. Autrement dit, celui qui sortait indemnes de ces épisodes à risque de développement adipocytaire, pouvait ensuite s’autoriser davantage d’écarts sans encourir le moindre risque de sanction. Nous avons-nous même évoqué cette idée dans ces colonnes. Or, elle est hélas fausse. Les études se sont multipliées ces dernières années afin de mieux comprendre la part de l’innée, celle de l’acquis et le rôle du « timing » dans cette histoire. Nos idées reçues ont été mises à bas.
UN CHILI CON CARNE TROP GRAS !
Un Mexicain de 500 kg a demandé une aide médicale pour ne pas succomber à son «obésité morbide», maladie dont il souffre depuis 20 ans, a révélé mardi la chaîne de télévision mexicaine Televisa. Manuel Uribe, 40 ans, n’est pas capable de se déplacer et vit reclus dans sa maison, où sa mère veille sur lui.
«Je ne me laisse pas mourir, j’ai envie de vivre. Mais pour cela, j’ai besoin d’aide, c’est pour cela que je m’adresse à la communauté scientifique», a-t-il déclaré à Televisa.
Jusqu’à l’âge de 22 ans, raconte-t-il, il vivait et travaillait aux États-Unis, il pesait alors 130 kg pour 1 m 94, «puis j’ai grossi sans m’arrêter, je suis devenu obèse très rapidement (…) Je crois que c’est un problème de glandes».
Il affirme être au régime mais continuer de grossir.
Les médecins lui ont proposé de l’opérer pour lui enlever une partie de la graisse, notamment aux jambes. «Je ne peux même plus me peser. Avant, quand je pouvais marcher, on me conduisait à la balance publique, la dernière fois je pesais 380 kg, aujourd’hui je dois peser 500 kg», dit-il.
CA COMMENCE AVANT MOI…
Le tissu adipeux apparaît au cours de la grossesse. Il entame son développement dès le second trimestre de vie intra-utérine, mais se forme pour l’essentiel au cours du 3e trimestre et après la naissance (7). Le développement de ce tissu se produit à partir de cellules précurseurs (les « préadipocytes »), mais reste possible tout au long de la vie adulte. En effet, des préadipocytes près à se différencier ont été retrouvés chez des octogénaires des deux sexes (2). Le développement du tissu adipeux de l’adulte, survenant à la fois par hypertrophie et hyperplasie est aujourd’hui bien documenté. Personne n’est donc potentiellement à l’abri, même si des vulnérabilités individuelles semblent exister. Il s’agit d’un phénomène irréversible ; le nombre d’adipocytes ne diminue jamais. Une partie du problème reste irrémédiable. L’équipe du Canadien Angelo Le Blanc s’est intéressée au devenir d’ex-obèses venus à la course à pied (12). On a effectivement constaté chez d’anciens gros rendus plus svelte par la réalisation de 80 km de jogging par semaine, un taux d’adiposité moyen supérieur à celle de coureur ayant toujours été maigres. Pourtant, ces ex-obèses possèdent des adipocytes moins replis. On pense donc que leur obésité a en partie été consécutive à cette surabondance de cellules adipeuses. Quelle est la part de l’inné, celle de l’acquis ? Quels facteurs alimentaires sont en jeu ? Comment interviennent-ils ? Comment envisager une prévention efficace compte tenu de l’épidémie d’obésité qui menace ?
On a longtemps cru que le fait de trop manger, ou de trop manger gras favorisait le déclenchement de cette prolifération adipocytaire. En fait, les choses sont plus compliquées. La faute en incomberait principalement au changement de nourriture des animaux de basse-cour ! Celui qui affirme cela est très sérieux. Il s’agit du Pr Pierre Weil, de l’Université de Rennes, qui a rassemblé les conclusions de ces travaux et exposé des données extrêmement inquiétantes dans un ouvrage particulièrement passionnant (« Tous gros demain ? » ). De nombreux travaux menés depuis le milieu des années 90 ont établi un fait d’importance colossale. Il concerne les acides gras poly insaturés ». Rappelons qu’il s’agit de deux familles de graisses d’une importance essentielle à notre survie, puisque à partir d’elles on élabore diverses molécules dont on sait qu’elles modulent l’inflammation, l’immunité, les tendances pro-allergiques, la circulation. Les dérivés des « oméga 6 » sont plutôt pro-inflammatoires et pro- aggrégantes.
Ceux des « oméga 3 » possèdent des effets opposés. Ces acides gras peuvent aussi agir directement sur le développement des adipocytes. En inhibant cette prolifération, dans le cas des « oméga 3 ». En l’activant, au contraire, dans le cas des « oméga 6 ». Le Pr Gérard Ailhaud, du fond de son laboratoire niçois, accuse nommément l’excès d’oméga 6 de provoquer l’obésité. Il n’hésite ainsi pas à affirmer : . Si l’indice d’adiposité (le rapport poids/taille) des enfants de moins d’un an augmente aussi vite, à un âge où le lait est l’aliment unique, on ne peut pas incriminer Mc Do, le grignotage, la télé et le déficit d’activité physique » (13). Le rapport optimal entre les deux familles d’acides gras polyinsaturés est de l’ordre de 3 à 5 « oméga 6 » pour un « oméga 3. Il y a quarante ans, il y avait effectivement dans les laits maternels 5 « oméga 6 » pour un « oméga 3 » (2). Aujourd’hui, les laits maternels contiennent 20, voire 25 oméga 6 pour un seul oméga 3.
L’indice d’adiposité suit exactement la même courbe que le rapport oméga6/oméga3 dans le lait. Comment l’expliquer ? Cela résulte en partie du changement de l’alimentation des animaux, elle-même consécutive aux changements brutaux survenus d ans notre agriculture, avec une offre qui ne suivait plus la demande. Que s’est-il exactement passé ? L’histoire nous est contée par le Pr Pierre Weil dans son livre « Tous gros demain ? ».
Dans les années 70, de plus en plus de Français ont mangé de plus en plus de fromage. Il a fallu davantage de lait l’hiver, de manière à répondre à cette demande accrue.
Or, jusque à ces années-là, l’essentiel de la production de lait s’effectuait au printemps. En cette saison, les vaches trouvaient des les prés l’herbe grasse (riche en « oméga 3 »), qui leur permettait de synthétiser un lait de qualité. Le vêlage se faisant au printemps, les vaches produisaient beaucoup moins de lait ensuite.
Pour contourner ce problème, l’industrie laitière a pu compter sur la « révolution fourragère « , survenue en même temps qu’une plante a connu un important essor sur notre sol : le maïs. Comme l’explique Pierre Weil, dans les années d’après-guerre, la France vise à assurer son autosuffisance alimentaire. La culture du maïs remonte progressivement vers le nord et conquiert les régions d’élevage.
A la même période apparaît l’ensilage, qui permet de conserver des fourrages. La plante va, grâce à cet ensilage, pouvoir être distribuée toute l’année aux vaches dont, simultanément, la période de vêlage va être décalée vers l’automne. L’essentiel de la production laitière surviendra alors l’hiver, au moment où les vaches se nourrissent de maïs et non plus d’herbe.
Mais c’est là que le bât blesse. « Il y a juste un petit problème, explique le Pr Weil. Dans l’herbe grasse, il y a beaucoup de graisses qui appartiennent à la famille « oméga 3 ». Dans le grain de maïs, il y a des graisses aussi, mais de la famille « oméga 6 ». Anciennement, l’hiver, on donnait du lin aux vaches. Or cette plante se caractérise par sa richesse en « oméga 3 ».
En une trentaine d’années, ces changements dictés par la pression économique ont eu des effets dévastateurs, dont on commence seulement à mesurer les conséquences en 2007 : On a créé une nouvelle alimentation animale, qui engraisse les animaux et prépare l’engraissage de ceux qui s’en nourrissent. Comme le note le Pr Ailhaud, les viandes les plus riches en « oméga 3 » (cheval, oie, lapin) sont celles des ruminants qui consomment davantage d’oméga 3.
De même, les poissons gras (pourvu qu’ils ne soient pas issus d’élevage et nourris au grain…) contiennent plus d’oméga 3, en particulier les acides gras dont les noms sont abrégés par « EPA » et « DHA », grâce au plancton ou aux algues qu’ils mangent.
« C’est au fond des océans et dans les champs, dans les pâtures, que poussent les oméga 6 et les oméga 3 qui sont la base de notre chaîne alimentaire. » (15).
De fait, les études menées chez l’animal, puis les observations faites chez l’homme, montrent qu’en accroissant la part des « oméga 6 » dans l’alimentation des animaux on fabrique du lait, des viandes, des œufs trop riches en « oméga 6 ». La femme enceinte fournit donc en « oméga 6 » le tissu adipeux du foetus, ce qui favoriser son développement. L’agression se poursuit avec l’allaitement, la diversification alimentaire…et se poursuit à l’échelle de plusieurs générations nourries aux « oméga 6 »… d’où l’idée de Pierre Weill, selon laquelle, demain, nous pouvons fort bien tous devenir obèses, à moins d’appliquer la parade qu’il a imaginée (voir l’encadré 2).
EST-CE DÉJÀ TROP TARD ?
La composition des huiles (voir le tableau ci-dessus) montre que sous l’effet de la pression des lobbies et de la politique de communication très volontariste de grands groupes de l’industrie agro-alimentaire, travestissant la réalité, le déséquilibre est volontairement entretenu. De fait, le profit est privilégié aux dépens de la santé des générations futures. L’huile de colza, a minima, est à réintroduire quotidiennement. Mais pas seulement (voir l’encadré 2).
Revenons aux sportifs, pour comprendre que le problème posé par cette révolution va au-delà de la gestion du poids pendant et après la carrière. En effet, la prédominance des « oméga 6 » dans nos tissus peut aussi conduire à une tendance pro-inflammatoire, pro-allergisante, pro-agrégante, très largement présente à l’échelle de la population. « J’aurais aussi pu intituler ce livre : « demain tous allergiques ? » ; s’inquiète d’ailleurs Pierre Weill. Cette tendance, qui se retrouve dans toutes les disciplines sportives, à ce que nous en savons, s’avère plutôt délétère. Les résultats de biologie relevés, par nos soins, au sein de l’élite de certaines disciplines depuis quatre ans, ne manque pas d’interpeller quant à la situation sanitaire des athlètes concernés. Les tableaux qui suivent dans l’encadré 3, laissent deviner l’ampleur de ces déficits en « oméga 3 », lesquels sont aggravés par les excès d’acides gras « oméga 6 », créant un terrain pro-inflammatoire, pro-allergisant, et propice à la prise de poids. Face à ce constat que pensent les « experts » qui se penchent sur l’assiette de nos champions ? Selon le diététicien de l’équipe du XV de France : Plutôt que la recherche de l’huile « miracle », une diversification des types d’huiles utilisées (…) est le meilleur garant d’une bonne répartition des acides gras ». (10).
LE LIN QU’IL NE FAUT PAS LAISSER FILER (13)…
Pour Pierre Weil, l’explosion endémique de l’obésité est en partie liée à la perte de « corrélation écologique » entre le sol, l’aliment et l’individu. Pour lui, la clef ne réside pas dans une majoration des apports en « oméga 3 » par les poissons gras. Nous sommes déjà les plus gros consommateurs en Europe, argumente-t-il. Et l’émergence à venir des fermes piscicoles nous prépare peut-être à beaucoup manger de … bœuf à écaille, si le thon et le bar sont gavés de maïs plutôt que de plancton ! Le chercheur breton a eu une autre idée : réintroduire le lin. Les animaux des éleveurs partenaires de son travail ont été nourris au lin. Les volontaires humains qu’il a recrutés ont mangé des œufs, du beurre, du fromage, issus de certains de ces animaux nourris au lin. Ils ont aussi bénéficié d’un pain enrichi aux graines de lin. Le groupe a été étudié sous tous les angles (poids, biologie) et comparé à un groupe « témoin » se nourrissant d’aliments classiques (14-5). A la sortie, perte de poids et amélioration des paramètres biologiques pour les volontaires nourris d’aliments qu’on peut qualifier de « traditionnels ». Pour lui, c’est vraiment une affaire de filière et de choix politique.
Ainsi, un œuf non « bio » pondu par une poule nourrie au lin aura plus d’effets favorables qu’un œuf « bio » pondu par une poule nourri au bon grain !
Le temps que cette transformation se mette en place à plus vaste échelle, le choix des huiles est évidemment crucial. De ce point de vue, il n’y a certes pas d’huile « miracle », mais celle de colza apparaît quand même comme la plus intéressante, et de loin. Et il y a l’hypothèse de la complémentation, encore inenvisageable par les institutionnels, par principe, il y a seulement 5 ans.
Leur position a évolué, à en juger au récent éditorial rédigé par la plume de Bernard Guy-Grand, l’un des plus éminents nutritionnistes français, dans la revue « Les Cahiers de Diététique et Nutrition » (5) : «On sait depuis longtemps que le DHA est l’acide gras prévalent du système nerveux central, de la rétine (…), que sa carence entraîne des troubles de la vision et des cognitions, notamment au cours de la phase de développement chez le fœtus et le jeune enfant. Supplémenter directement? La question mérite d’être posée! »
Denis RICHE
Doctorat en nutrition humaine et
Spécialiste français de la micronutrition
ARTICLES CONSULTES :
(1) : AHIMA RS (2005) : Trends Endocrinol.Metab., 16 : 307-13.
(2) : AILHAUD G (2007) : Cah.Nutr.Diét., 42 (2) : 67-72.
(3) : BOULOUMIE A, CURAT C & Coll (2005) : Curr.Opin.Clin.Nutr.Metab.Care, 8 : 347-54.
(4) : BYRNE GI, LEHMANN LK & Coll (1986) : J.Interfer.Research., 6 : 389-96.
(5) : GUY-GRAND B (200) : Cah.Nutr.Diét., 42 (3) : 117.
(6) : LAFONTAN M (2007) : Cah.Nutr.Diét., 42 (2) : 79-83.
(7) : POISSONNET C, BURDI A & Coll (1983) : Early Hum.Dev., 8 : 1-11.
(8) : POITOU C, CLEMENT K (2007) : Cah.Nutr.Diét., 42 (2) : 90-6.
(9) : RICHE D (2007) : « Micronutrition, santé et performance », De Boeck Ed. 600 p.
(10) : RUBIO D, RIVIERE D- (2007), « Kinésithérapie scientifique », n° 478, p 42.
(11) : TRAYHURN P (2005) : Endocrinology, 146 : 1003-5.
(12) : TREMBLAY A, DESPRES JP & Coll (1984) : Int.J.Obes., 8 : 641-8.
(13) : WEILL P (2007) : “Tous gros demain?”, Plon Ed.
(14) : WEILL P, SCHMITT B & Coll (2002) : Nutr.Clin.Métab., 16 (Suppl.1) : 7-28.
(15) : WEILL P, SCHMITT B & Coll (2002) : Ann.Nutr.Metab., 46 : 182-91.
(16) : ZIEGLER O, TREBA A & Coll (2007) : Cah.Nutr.Diét, 42 (2) : 85-9.
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AEIFA, 16 rue Vincent Compoint 75018 PARIS
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APPROCHE TOXIQUE DE LA MUSCULATION par Aurélien Broussal Derval en partenariat avec la FFHMFAC
Les différentes activités de musculations, quelles que soient les méthodes employées ou ses objectifs poursuivis, sont des disciplines à part entière, qui reposent comme tous les autres sports sur des fondements techniques pointus. Ne pas les respecter, c’est trahir l’essence même de ces sports, et plus gravement s’exposer à des blessures très graves.
«La fonte» a le vent en poupe. Respectabilisées par l’Olympique et éminemment technique haltérophilie, modernisées par la préparation physique, (re)mises à la mode grâce au crossfit, les différentes activités «poids et haltères» sont omniprésentes dans le paysage sportif, qu’elles permettent d’atteindre des objectifs de performance, de bien-être, ou d’esthétisme. Mais il ne faut pas oublier que ces disciplines (haltérophilie, force athlétique, culturisme ou cross fit), sont avant tout des sports à part entière, dont le plus assidu des pratiquant mettra plusieurs années à acquérir la maîtrise experte.
Or, l’impatience d’un résultat visible pousse souvent les pratiquants (voire même les coaches) à en accélérer et parfois même négliger la rigueur et la précision technique. Mais ce gain -apparent- de temps au démarrage du processus, se traduit à l’échelle d’une carrière sportive par une perte colossale de temps allant parfois jusqu’à l’arrêt de toute pratique sportive.
Ce terrible constat, pousse certains pédagogues à éviter le travail avec charge additionnelle, ou certains mouvements réputés dangereux, alors que les haltérophiles et force-athlétisme sont (et de loin) les sportifs qui se blessent le moins. Entre ces spécialistes de la force très peu exposés à la blessure et les pratiquants ponctuels mis en dangers par une pratique inadaptée, se cache la technique qui ne peut être compromise sous aucun prétexte. C’est le prix à payer pour que tout le temps passé dans la salle de musculation serve tout autant la performance que la prévention.
Nous avons choisi de démarrer une série d’articles sur le sujet, en explorant tout d’abord les risques majeurs induis par une pratique inadaptée.
La coiffe des rotateurs : zone sensible
La coiffe des rotateurs est mise à rude épreuve dans de nombreuses situations sportives. La blessure fortuite survenant lors d’un accident, ou la répétition d’un geste inapproprié plaçant l’épaule en situation de conflit chronique, déclenchent généralement l’inflammation.
Quand la glène scapulaire, trop peu congruente, est exposée à un mouvement inapproprié de l’épaule, un décentrage ou un dérapage de la tête humérale peut se produire. C’est ce que l’on appelle un «conflit d’épaule». Plus ces conflits d’épaules sont intenses, ou répétés dans le temps, et plus ils vont exposé les muscles de la coiffe à l’inflammation.
En effet, c’est justement entre la voûte coraco-acromiale et la tête humérale que passent les tendons des muscles de la coiffe. Ils peuvent alors se retrouver «pincées» entre la tête humérale et la voûte coraco-acromiale.
Illustration : Vue de dos de l’épaule.
La voûte coraco-acromiale est composée de l’acromion, de l’articulation acromio-laviculaire, de la coracoïde, et du ligament acromio-coracoïdien.
La coiffe des rotateurs est composée quant à elle de 5 muscles : le supra-épineux, l’infra-épineux, le petit rond, le sub-scapulaire et le long biceps.
Les conflits d’épaule
Pratiquement, les conflits d’épaule surviennent en fin de mouvement, et sont douloureux au point de perturber la bonne exécution du geste sportif. Ils résultent d’une utilisation intense, et répétées de l’articulation créant par leur inadaptation biomécanique, un frottement ou un cisaillement entre l’os et un ou plusieurs tendons ou bourses séreuses. De nombreux mouvements de musculation régulièrement mal utilisés exposent le sportif à des conflits d’épaule, et sont donc potentiellement traumatisants. Sans prétendre à l’exhaustivité, nous vous présentons ici les grands classiques.
- Élévation latérale
Tout d’abord l’élévation dynamique latérale d’haltère court (ou d’élastique) debout, visant généralement le renforcement du deltoïde moyen (voir illustration).
La plupart des débutants commentent spontanément cette erreur technique, qui, si elle n’est pas corrigée, conduira inévitablement à la blessure. Pour éviter cela, l’exécution correcte aura pour finalité du mouvement l’élévation de la pointe du coude au niveau de l’épaule. Autant que possible, c’est le coude qui guidera l’angle et l’élévation du bras, et non le poignet, favorisant une rotation interne du bras, et une activation du muscle trapèze.
- Le tirage haut
Autre exemple exposant l’épaule à un conflit antéro-supérieur, le tirage haut, souvent utilisé dans les «rowing verticaux», ou les mouvements techniques et semi-techniques d’épaulés. On peut de plus en plus fréquemment observer cette -grave- erreur technique à l’entraînement, depuis l’émergence incontrôlée du crossfit, que ce soit au cours d’épaulés ou tirages verticaux dynamiques, avec barre ou kettlebell (voir illustration). La hauteur du tirage, l’écartement des mains, mais surtout la trajectoire de la barre (le plus près du corps possible), renvoient aux fondamentaux haltérophiles que nous aborderons ultérieurement.
- Le développé-couché
Enfin le travail du grand pectoral, notamment au cours du mouvement «star» des salles de musculation, le développer coucher, qu’il soit pratiqué avec haltère ou barre conventionnelle, peut être, si il est mal réalisé, une menace pour la stabilité de la tête humérale. Notons que ce mouvement est fondamentalement problématique. De même qu’il n’est pas bénéfique pour la santé neurologique d’un boxeur de recevoir des coups dans le visage, ou pour la sanité rachidienne d’un judoka de se faire projeter à plat dos, le force-athlétiste expose systématiquement son épaule lors de l’affrontement compétitif en développé couché.
Utilisé dans un cadre loisir (donc sans nécessairement rechercher la meilleure performance possible systématiquement), les effets négatifs de cet exercice particulièrement populaire peuvent néanmoins être contrôlés. Bien souvent, les pratiquants assidus favorisent un travail sur banc large (car plus stable), et une prise écartée (voir illustration).
La verticalité de la charge parachève de figer l’omoplate dans le banc, alors que le raccourcissement du pectoral, qui provoque un glissement de la tête humérale en avant de la glène de l’omoplate, nécessiterait justement plus de mobilité de cette dernière. S’en suit un décentrage antérieur provoquant les classiques douleurs antéro-internes d’épaule. Dans ce cas également, la maitrise des fondamentaux techniques du développé couché, associée à certains aménagements préventifs, dépasse largement le cadre de cet article. Mais le choix judicieux d’un banc fin, et d’une prise de barre resserrée (dite «anatomique») au détriment des charges les plus lourdes possibles, constituent de premières pistes faciles à suivre pour rendre ce mouvement anatomiquement plus confortable. Dans le cas du travail avec haltère, il conviendra de limiter l’amplitude du mouvement, et ainsi le raccourcissement du pectoral, et donc son effet principal de décentrage antérieur.
Le placement du dos : une préoccupation de tous les instants
Quoi que l’on fasse en musculation, le placement du dos est un fondamental. Encore plus pour les mouvements de tirages, ou encore pour les mouvements debout.
Dos rond, ou à l’inverse en hyper-extension incontrôlée, dos non-verrouillé (comprenez par la là passivement mobile durant le mouvement), cyphose exagérée, sont autant de défauts techniques constatées couramment à l’entraînement et risquant d’entraîner de très graves pathologies.
La région lombaire est la plus souvent incriminée. Elle est bien souvent la conséquence d’une inflammation des petits muscles intervertébraux profonds reliés au transverse. Une rotation inappropriée répétée, une hyper-extension de la colonne vertébrale, sont les raisons les plus couramment diagnostiquées quant à l’inflammation lombaire spontanée. D’un point de vue structurel, on peut citer l’inflammation chronique liée à une pratique inappropriée des abdominaux (par exemple les battements à ras du sol, qui par antéversion du bassin provoque l’activation des psoas iliaques, eux-mêmes directement insérés sur les lombaires), mais aussi la négligence des muscles transverses (activables par différentes techniques lors des séances d’abdominaux), pouvant transférer les contraintes vers les muscles profonds vertébraux. Illustration : Anatomie lombaire.
La région lombaire est d’autant plus exposée dans la dynamique d’un squat, d’un tirage, ou pire encore d’un soulevé terre effectué «dos rond», ou bassin en rétroversion (voir illustration).
Le sportif (ou le coach) donnant sur le placement juste et sécuritaire la priorité au nombre de répétitions maximal, ou au poids maximal de la charge, s’expose ainsi à de lourdes discopathies. L’arrondissement du dos guette en effet tout sportif ne respectant pas la règle d’or suivante «le prix d’une répétition supplémentaire n’est jamais la détérioration du geste technique».
Le prix du mouvement de trop, lorsqu’un sportif persiste pour poursuivre sa série mal placé, est ainsi de comprimer l’avant des disques vertébraux, et d’en allonger l’arrière, risquant de propulser, si le disque est fragilisé, le noyau vertébral en arrière, comprimant les structures nerveuses vertébrales. Cette pathologie particulièrement douloureuse et incapacitante, survient généralement entre L3 et L4.
Trois éléments combinés permettent de sécuriser le placement du pratiquant.
- Tout d’abord l’extension dorsale à l’amorce du mouvement: l’antéversion contrôlée du bassin permet de garantir un dos au minimum plat tout au long de la mise sous tension de la colonne vertébrale. En outre, cela évite, et tout particulièrement au niveau de L3 et L4, le pincement antérieur des disques intervertébraux.
- Sortir la poitrine,
- tirer les épaules en arrière en resserrant les omoplates l’une contre l’autre parachèvera la posture dorsale idoine, empêchant la poitrine de basculer vers l’avant, entraînant l’arrondissement du dos. N’oubliez pas d’activer les muscles profonds responsables de la posture et de la pression abdominale aidant à maintenir le dos en place.
N’oublions pas que la blessure dans la pratique anarchique de la musculation est plus souvent chronique et sournoise, qu’aigüe et spontanée.
L’une des pathologies dorsales les plus répandues est ainsi la cyphose anormalement prononcée (généralement associée à une fuite des épaules en avant). Si cette pathologie peut être totalement posturale, souvent liée au psychologique (notamment à l’adolescence), dans le cadre de la musculation, elle est favorisée voire totalement provoquée par différentes pratiques incohérentes. Le renforcement prioritaire (et parfois exclusif) des muscles pectoraux, où à l’inverse l’absence de travail des muscles entourant les omoplates et de la coiffe des rotateurs sont les explications les plus courantes.
Ainsi le gainage scapulaire constitue tout autant une priorité, même si l’impact esthétique est minime, que le renforcement de la chaîne de répulsion. Plus que jamais, l’équilibre agoniste/antagoniste devra-t-être respecté pour éviter toute pathologie posturale dorso-scapulaire. Enfin, chaque tirage sera précédé d’une activation des muscles de la coiffe par une rotation externe des épaules, et une activation des fixateurs d’omoplate en resserrant les omoplates l’une contre l’autre.
Aurélien Broussal Derval
Préparateur physique d’athlètes de Haut Niveau
Co-auteur des livres « La préparation physique moderne »
et « Les Tests de terrain »
Bibliographie.
-La préparation physique moderne, Aurélien Broussal-Derval et Olivier Bolliet, 2nde Edition, 2012, Editions 4Trainer.
-Guide des mouvements de musculation, Frederic Delavier, 5ème Edition, 2012, Editions Vigot.
-Suivez l’auteur sur Facebook (Aurélien Broussal) et Twitter (Twittorel).
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La pubalgie chez le runner par Fabrice Bedin
Lorsque l’on parle de pubalgie, on se doit de faire un point sémantique sur le sujet. On entend souvent à tort et à travers des “diagnostics” de pubalgie alors qu’ils ne reposent sur aucune origine de la structure lésée. Je m’explique … La pubalgie est comme son étymologie l’indique une algie du pubis donc une douleur de la zone pubienne. La pubalgie est donc un symptôme et non une pathologie (maladie). Ce qui signifie qu’il faut en déterminer la cause (l’étiologie).
De nombreux diagnostics sont possibles. Dans un souci didactique, je vais me contenter des plus fréquents en les détaillants et citer les plus rares.
Il faut savoir qu’en médecine, on considère que ce type de douleur arrive majoritairement chez le sujet jeune sportif surentraîné.
Le traitement ne peut être abordé dans cet article car ce dernier dépendra évidemment du degré d’atteinte de votre pathologie.
Pour en savoir plus, clic:La pubalgie chez le runner par Fabrice Bedin 1
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LA CHAUSSURE DE SAUT EN HAUTEUR
LA CHAUSSURE DE SAUT EN HAUTEUR, UNE SUCCESSION D’INNOVATIONS par Thierry Blancon
Matelas en mousse, pistes synthétiques… Après 1968, le matériel de saut en hauteur change totalement. Les chaussures de saut qui équipent les athlètes suivent cette révolution mais les transformations sont la suite d’une lente évolution qui avait débutée dès la fin du 19ème siècle.
On ne pourrait pas parler de saut en hauteur sans rappeler qu’au cours
des décennies, les chaussures ont apportées un gain supplémentaire à cette
spécialité.
Coïncidence?
Si les chaussures à pointes étaient très polyvalentes, elles sont devenues assez rapidement spécifiques. Plus de dureté, des pointes aux talons… C’est pourtant vers les années 50 qu’il faut concentrer notre attention. Jacques DUDAL se rappelle avec malice:
« En 1953, avec Victor SILLON, nous sommes allés à MOSCOU. Nous avons rencontré un entraîneur du nom de DYATCKOV. C’était un personnage rigoureux qui s’intéressait à tout. Victor a fait quelques démonstrations et notamment de notre dernière habitude qui consistait à placer une surélévation de quelques centimètres à l’appel. L’impulsion s’en trouvait modifiée. Le sauteur était obligé de « monter davantage sur l’appui » et de se servir de ses segments libres. Le dynamisme de l’impulsion et la verticalité étaient accrus. DYATCKOV semblait intéressé. «
En 1955: Robert PARIENTÉ écrit que le suédois Bengt NILSSON avait montré à MOSCOU une chaussure à semelle épaisse. En 1957: le Soviétique Yury STEPANOV battait le record du Monde du saut en hauteur. La chaussure d’appel avait été transformée de manière à surélever de 3 à 4 cm l’avant du pied par rapport au talon! L’ingénieux DYATCKOV avait eu l’idée de placer un mini tremplin sous le pied d’appel (cf. dessin #1). Les petites idées font parfois du chemin.
Dessin #1, d’après un croquis de l’ÉQUIPE, le prototype mis au point par les Soviétiques (image fournie par Michel JAZY, Adidas).
Beaucoup ont pensé que l’astuce consistait à surélever le pied d’appel par rapport à l’autre : l’épaisseur élèverait d’autant la hauteur du Centre de Gravité au décollage. Dans cette optique, la différence d’épaisseur entre le talon et l’avant du pied ayant été rapidement limitée à 13 mm certains ont essayé de ne pas mettre de chaussure côté jambe libre. Mais la semelle compensée offrait d’autres avantages. Le Dr ANDRIVET faisait observer que l’épaisseur augmentait le rendement du mollet:
« On s’est aperçu que surélever l’avant du pied par rapport au talon provoque un étirement, une mise en tension importante du mollet (cf. dessin #2). L’étirement du fuseau neuromusculaire entraîne une forte contraction réflexe du triceps sural et la performance s’en ressent sensiblement. »
Un modèle de référence…
Dès les années 70, on arrive à un modèle de référence qui sert encore de base de construction aux modèles actuels (cf. photographie).
C’est la chaussure d’appel de Gislaine BARNEY, la première française à franchir 1,80 m qui est photographiée ici. Aujourd’hui, les sauteurs ne voudraient plus de ce type de chaussure qu’ils estimeraient, à raison, dépassée mais celles qu’ils portent aux pieds ne sont pas si différentes de modèles plus « vintages ».
Innovations, innovations & encore innovations…
La concurrence et la règlementation sur le matériel s’assouplissant, pas à pas, les constructeurs innovent depuis un quart de siècle. Pour premier exemple, le règlement autorise jusqu’à onze pointes par chaussure (ce n’était pas le cas dans les années 60-70): cette possibilité est totalement exploitée mais pour une adhérence encore meilleure des essais sont faits pour que les semelles soient antidérapantes sans pour autant perturber les sensations plantaires des sauteurs par le trop de reliefs qu’elles pourraient présenter.
Pour deuxième exemple, les matériaux, les textiles sont de plus en plus légers: les chaussures le sont aussi mais aujourd’hui ce confort ne nuit pas à la dureté de la semelle ou à la rigidité de la coque. C’est un point technique indispensable qu’impose une prise d’appel à la fois tonique et sécurisante.
DEMAIN ?
…
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LE FOSBURY FLOP, UNE INNOVATION OU UNE CRÉATION ?
LE FOSBURY FLOP, UNE INNOVATION OU UNE CRÉATION ? A VOUS DE JUGER…par Thierry Blancon
Un peu d’histoire…
Au vingtième siècle, le saut en hauteur évolue. Les instances internationales souhaitent développer une épreuve qui ne soit pas un numéro d’acrobates… Le règlement interdit non seulement de prendre son appel à pieds joints mais aussi interdit et de passer la tête en premier au-dessus de la barre. A partir du saut en ciseau, on va décliner de nombreuses variantes.
On se rappelle, tout particulièrement, en 1895, le ciseau à retournement intérieur de Michael SWEENEY qui prenait son élan en courbe et engageait son genou libre fléchi. Une façon de sauter qui n’est pas sans rappeler ce que Dick FOSBURY développera soixante ans plus tard. Mais on pourrait tout aussi bien comparer les techniques de LEWDEN, de SHELLENZ ou de GESPAR.
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Pour en savoir plus, clic: HISTOIRE DU FOSBURY FLOP
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L’entraînement du 400 haies en France
L’entraînement du 400 haies en France – Essai de point des connaissances par JJ BEHM
Ça a « commencé » en 1960
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- Les Champions d’Europe du 4X4 à Berne 1954, selon leurs dires, ne s’entraînaient pas: GOUDEAU, MARTIN DU GARD, HAAROF, DEGATS jouaient au foot, se déplaçaient en vélo, y compris pour aller aux compétitions, et ne se retrouvaient sur une piste que le jeudi, où ils faisaient un 400.
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- Cela ne les a pas empêchés de courir en moins de 48, sur cendrée bien sûr.
- A part quelques exceptions, on ne peut parler d’entraînement construit qu’après les Jeux de ROME 60.
Pour en savoir plus, clic: L entraînement du 400 haies en France
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ANALYSE DES EXIGENCES DE LA PERFORMANCE SPORTIVE SUR 800M COURSE
ANALYSE DES EXIGENCES DE LA PERFORMANCE SPORTIVE SUR 800M COURSE par Amandine Le Cornec
L’analyse des exigences de la performance du 800 s’avère multifactorielle. Afin de perfectionner dans cette discipline, il ne faut pas seulement faire appel au développement des capacités physiques ou physiologiques. Il faut également mettre en interaction les facteurs psychologiques, morphologiques, techniques sans oublier la tactique et l’économie de course.
PROFIL DU 800m
Demi fond court
Maintien d’un effort intense prolongé
Épreuve courue à 120 – 125% VMA
Épreuve courue en dette d’O2
Sollicitation des filières anaérobie lactique (60%) et aérobie (40%)
Essentiellement de la Capacité anaérobie lactique (CAL)
FACTEURS LIES A LA PERFORMANCE SUR 800 M
Facteurs Psychologiques / Résistance à la souffrance / Motivation / Résistance au stress
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Le guidage de l’engin : Les Gammes de courses spécifiques au javelot
Vidéo gammes de courses spécifiques en cliquant sur le lien ci-dessous
https://www.youtube.com/watch?v=THFbLihS0uA
Vidéo extrait du DVD Javelot Concept par Jack DANAIL
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